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LES ACTIVITÉS SUR LA FERME

J’aimerais maintenant vous donner une idée générale des occupations de toutes les familles nombreuses de ce temps-là, les familles qui longeaient la rivière jusqu’au Canadien National et l’écluse, et quelques-unes plus loin qui faisaient aussi partie de notre vie de tous les jours.

Les travaux d’été

Je vais tenter de vous résumer les travaux d’été chez nous et dans les alentours. Après Pâques, avec l’arrivée des belles journées ensoleillées, nous commencions le ménage dehors. La maison avait déjà été préparée pour Pâques, les journées commençaient à être un peu plus longues, et cela nous permettait de faire du ménage, c’est-à-dire le nettoyage autour des bâtiments, la préparation des terres pour le jardin en même temps que celles des champs. Les classes à l’école tiraient à leur fin et chacun avait ses tâches à accomplir. Certains travaux extraordinaires étaient entrepris après que les tâches familiales avaient été accomplies.

 

La rivière qui coulait à flots tout près depuis deux à trois semaines nous causait des soucis quand elle dépassait ses limites. Mais en même temps, elle nous donnait un encouragement par sa propreté et son bouillonnement de fraîcheur. Chaque printemps, nous nous imaginions explorateurs en bravant ce cours d’eau. Soit en chaloupe, soit en radeau ou tout simplement sur une vieille porte qui pouvait nous porter, on se laissait aller par le courant. L’important, c’était de rejoindre le rivage avant d’arriver à l’écluse ou d’être pris à descendre la rampe qui laissait passer le surplus d’eau.

Nous étions donc occupés à préparer les jardins, à prendre soin des betteraves à sucre et à surveiller l’apparition du king head pour l’arracher.

Il fallait donner les soins nécessaires aux champs et aux récoltes, car ça faisait partie de nos revenus annuels, et c’est cela qui donnait de la stabilité à l’ensemble de notre famille. La surveillance du jardin, du commencement à la fin pour finalement profiter des récoltes à l’automne, qui nous donnait un peu d’argent de poche. On vendait un paquet de radis pour cinq cents, une bonne poignée de carottes pour dix cents, etc. Ce n’était pas une question de devenir riches, les gens nous en demandaient, il ne fallait pas trop les décevoir.

La cueillette des fruits sauvages arrivait en pleine force pendant les gros travaux d’été, ce qui entraînait une grande variété de mise en conserve pour l’hiver.

Nous avions en même temps des occasions de pratiquer des loisirs. Les parties de cartes des quatre coins de la paroisse étaient terminées, et là, on s’orientait vers la balle et d’autres jeux semblables, tout en se préparant pour nos pique-niques du dimanche. C’étaient les parties de balle dure qui attiraient le plus d’attention. Chaque village se volait des joueurs pour obtenir la meilleure équipe. On pratiquait les soirs de semaine après le travail et le dimanche après-midi. Toutes ces activités commençaient à nous donner un avant-goût des parties à venir, ou si vous préférez « les finales ». Une fois que les clubs de balle étaient constitués, on pouvait se permettre de jouer des parties ici et là tout en se préparant pour les compétitions éliminatoires. À tour de rôle, les paroisses telles qu’Élie, Saint-Eustache, Fannystelle, Saint-François-Xavier et Saint-Laurent, entre autres, se rencontraient à toutes les occasions possibles afin d’augmenter leurs chances dans les éliminatoires. Toutes les équipes avaient de la difficulté à gagner contre l’équipe de Saint-Laurent parce qu’elle avait toujours des lanceurs chevronnés. Nous avions aussi plusieurs rencontres de familles et d’amis qui avaient lieu tout naturellement durant les rencontres paroissiales et à chaque occasion qui se présentait. Ces rencontres finissaient aussi simplement qu’elles avaient débuté, les gens satisfaits de s’être vus une autre fois, et d’avoir partagé des expériences paroissiales ou même personnelles. Il fallait toujours être prêt à l’arrivée de la parenté. Nous avions les deux frères et les deux sœurs de mon père qui avaient de la famille en Californie. Et souvent, ils se pointaient comme un cheveu sur la soupe… durant la saison de nos gros travaux.

Je crois que j’ai déjà décrit la journée d’un pique-nique dans chacune de nos paroisses. Il y avait obligatoirement la balle, la roue de fortune, le marteau à tête ronde, les cerceaux, les chiens chauds, les cornets de crème glacée, et j’en passe. Durant les journées chaudes de l’été et après avoir travaillé dans les betteraves, on demandait la permission d’aller se baigner au pit à Désilets ou au pit à Hewko qui était en arrière de chez nous. Pour ceux qui ne savent pas ce qu’est un pit, c’est un trou dans le coin d’un champ servant à contenir de l’eau, soit pour les chevaux, soit pour le tracteur, ou tout simplement pour avoir de l’eau à portée de main.

Le pit à Désilets était situé à environ deux milles de la rivière, on marchait sur la voie ferrée pour s’y rendre, on avait le choix, c’était pour changer le mal de place. Il fallait toujours faire attention de ne pas se noyer, mais on n’y pensait pas trop. On savait tous nager et je suppose qu’on se surveillait les uns les autres. Je me souviens qu’à l’âge de six ou sept ans, après avoir mentionné que j’aimerais savoir nager, mon cousin m’avait tout simplement jeté en dehors du bateau et quand j’ai voulu suivre et m’accrocher au bateau, il donnait un coup de rame pour s’éloigner. Quand j’ai compris le jeu, j’ai fait un tournant de 90 degrés et visé la rive de la rivière; j'ai abouti dans un tas de vieilles branches, de fils barbelés et bien plus encore. Une fois rincé et toujours vivant, je me suis rendu compte que je venais d’apprendre à nager.

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(suite au prochain numéro)

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